La pauvreté selon l’activité
Chômeurs et inactifs sont beaucoup plus exposés à la pauvreté que les personnes qui travaillent. En vingt ans, leur taux de pauvreté a augmenté. Mais le travail ne protège pas entièrement. Parmi les adultes pauvres, près d’un tiers ont un emploi.
Publié le 10 décembre 2024
https://www.inegalites.fr/La-pauvrete-selon-l-activite - Reproduction interditePlus de la moitié des personnes pauvres de 18 ans ou plus sont « inactives », selon les données 2022 de l’Insee. Cela veut dire qu’elle ne travaillent pas et ne sont pas au chômage [1]. Il peut s’agir de retraités, d’adultes qui ont quitté le marché du travail, de personnes au foyer, ou d’étudiants qui vivent chez leurs parents.
Le taux de pauvreté des retraités (4,4 %) est presque deux fois moins élevé que la moyenne de l’ensemble des adultes (7,2 %). En effet, les niveaux de vie progressent en général au cours de la vie active, si bien que les retraites sont supérieures au seuil de pauvreté. De plus, les retraités n’ont généralement pas d’enfant(s) à charge, ce qui compte dans le calcul des niveaux de vie.
La proportion de pauvres atteint 22,1 % chez les « autres inactifs ». Ces derniers représentent plus du tiers des adultes pauvres. Une catégorie souvent oubliée, composée de personnes qui ne travaillent pas pour de multiples raisons qui peuvent se combiner : études, présence d’enfant(s) sans mode de garde, état de santé, handicap, faibles qualifications, etc.
L’autre moitié de la population pauvre est active (salariés, indépendants, chômeurs). 14 % des pauvres sont des chômeurs [2] qui, souvent, ne touchent aucune indemnité ou un faible montant. Un quart des chômeurs vivent sous le seuil de pauvreté.
Près d’un tiers des personnes pauvres sont en emploi, 19 % de salariés et 12 % d’indépendants. Toute une partie de ces derniers, qui travaillent à la tâche, ne disposent que de très faibles revenus. En proportion, seuls 2,9 % de l’ensemble des salariés sont pauvres. Un taux quatre fois moindre que celui des indépendants, et huit fois moins élevé que celui des chômeurs.
Pauvreté selon l'activité | |||
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Nombre de personnes pauvresen milliers | Taux de pauvretéen % | Part dans la population pauvreen % | |
Salariés | 687 | 2,9 | 19 |
Indépendants | 447 | 12,5 | 12 |
Chômeurs | 496 | 24,5 | 14 |
Retraités | 656 | 4,4 | 18 |
Autres inactifs* | 1 325 | 22,1 | 37 |
Ensemble des adultes | 3 611 | 7,2 | 100 |
Source : Insee – Données 2022 – © Observatoire des inégalités
La pauvreté augmente chez les inactifs
Le chômage expose plus à la pauvreté aujourd’hui qu’à la fin des années 1990 : 21,6 % des chômeurs étaient pauvres en 1996, ils sont 24,5 % dans ce cas en 2022. La hausse du taux de pauvreté des chômeurs a essentiellement eu lieu dans les années 2000.
Chez les actifs en emploi, le taux de pauvreté a très peu évolué, restant inférieur à 5 %. C’est le taux de pauvreté des inactifs non retraités qui a augmenté le plus, passant de 14 % en 1996 à 22,1 % en 2022, atteignant presque celui des chômeurs. Nous manquons de travaux scientifiques pour documenter ce phénomène, qui peut être lié, par exemple, au fait qu’une partie des jeunes demeure plus longtemps chez leurs parents, qu’ils étudient ou n’arrivent pas à accéder à un emploi durable.
Source : calculs de l'Observatoire des inégalités d'après l'Insee – © Observatoire des inégalités
La pauvreté étudiante en hausse ? |
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L’Insee ne mesure pas la pauvreté étudiante. Les étudiants qui ne vivent plus chez leurs parents sont exclus de ces données car on connait mal les aides que leur apportent leurs parents. Quant à ceux qui vivent chez leurs parents, ils sont considérés comme pauvres si leurs parents le sont, et non en fonction de leurs ressources propres. Le chiffre parfois cité de 19 % d’étudiants qui vivent sous le seuil de pauvreté ne concerne ainsi que les étudiants qui vivent chez leurs parents, et remonte à 2012 [3] ! Les années 2010 ont été marquées par une hausse de 20 % de la population étudiante, soit 500 000 étudiants supplémentaires. Une partie d’entre eux sont issus de familles modestes aux moyens limités. Vu la faiblesse des bourses de l’enseignement supérieur, un grand nombre se retrouve en difficulté. Selon l’Observatoire national de la vie étudiante, 26 % des étudiants déclarent avoir des difficultés financières importantes et 20 % disent qu’il leur est impossible de faire face à leurs besoins en termes d’alimentation, de loyer, de gaz ou d’électricité (données 2023). |
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[1] Les chômeurs sont considérés comme des actifs.
[2] Les personnes comptées comme chômeuses par l’Insee répondent à des critères très stricts définis par le Bureau international du Travail (BIT) : elles n’ont pas du tout travaillé dans la semaine qui précède l’enquête, recherchent activement un emploi et sont immédiatement disponibles.
[3] Au seuil de pauvreté fixé à 60 % du niveau de vie, selon « Les niveaux de vie en 2012 », Insee Première n° 1513, Insee, septembre 2014.
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